Journée de la femme… vraiment?

Journée la femme… Vraiment ?

 

Après ce 8 mars, « Journée internationale des droits de la femme » en pleine  campagne électorale, quand on passe en revue les programmes des candidats à l’élection présidentielle, on ne peut qu’être consterné. Si on laisse de côté la captation des principes républicains de laïcité et d’égalité homme/femme par le Front national pour des raisons qui ne trompent plus personne, il faut bien constater chez les autres candidats soit le vide, soit une approche par le petit bout de la lorgnette, du type « voile à l’université ? ». Comme si c’était la question essentielle…

 

Aucun, en fait, ne positionne la question des droits de la femme par rapport aux ambitions, prétentions et avancées, en France, de l’islamisme sur la question de principe : l’égalité homme-femme proclamée dans les programmes va-t-elle jusqu’au point de s’opposer, au besoin par l’interdiction législative, à certaines  visées de l’islamisme ? Lorsque cela est esquissé chez un candidat, aucun n’en tire les conséquences qui s’imposent pourtant. Par ignorance, angélisme ou démagogie électorale ?

 

Car c’est pourtant bien des principes fondamentaux consacrés par la République française[1], puis par l’Europe occidentale[2], qu’il faut partir pour imposer le respect de nos valeurs aux confessions, à toutes les confessions, présentes sur notre sol[3].

 

Puisque, malgré de nombreux articles, nous n’avons été ni compris, ni entendu, par les candidats nous allons nous répéter en espérant être plus clairs. Il est encore temps pour tous les républicains de se ressaisir, et de délaisser les visions naïves ou démagogiques, en espérant que la Journée de la femme puisse en être  enfin l’occasion..

 

Sur le plan des principes, est inacceptable toute remise en cause pour des raisons confessionnelles de l’égalité homme/femme et des droits de ces dernières, notamment de leur souveraineté, qui doit être totale, sur leur corps. Vouloir occulter et exclure les femmes de l’espace public est inacceptable et devrait constituer un crime contre la moitié féminine de l’Humanité.

Les idéologies religieuses totalitaires qui, comme l’islam radical, professent le contraire ne sont pas acceptables d’autant plus lorsqu’il s’agit de manifestations prosélytes dans l’espace public qui, par discours ou signes explicites, visent à étendre  l’emprise de cette idéologie.

 

Dans nos démocraties, on ne peut cependant interdire une idéologie mais on peut réglementer restrictivement son expression lorsqu’elle est jugée contraire à nos principes fondamentaux.

Autrement dit, dans l’arbitrage entre la liberté d’expression et les autres droits fondamentaux, nous pouvons décider que ces derniers l’emportent, s’agissant de l’expression d’une idéologie que nous jugeons totalitaire et dangereuse.

 

C’est ce qu’a fait la Cour européenne des droits de l’Homme (CDEH) dès 2003. Elle a décidé qu’un parti politique professant l’islam radical (et sa charia) ne pouvait bénéficier de la protection de la Convention européenne des droits de l’Homme du fait même qu’il récusait les valeurs démocratiques et les principes fondamentaux sous la protection desquels il prétendait se placer  dans le but de voir condamner sa dissolution en tant que parti par le gouvernement turc. On ne peut plus logique : on ne peut se situer dehors et dedans à la fois.

 

Nous sommes donc en droit, sur le fondement de cette décision de la CEDH, de considérer que les organismes, les associations et les individus qui professent l’islam radical (et sa charia) sont hors des valeurs républicaines et ne peuvent revendiquer leur protection pour poursuivre leurs visées prosélytes et totalitaires.

 

D’ailleurs, une étude récente sur les données de la radicalisation publiée par Le Monde du 4 mars dernier (page 12) montre l’importance du prosélytisme pour la radicalisation puisque, si 3246 femmes ont été signalées à ce jour comme radicalisées en France, près de 50% d’entre elles sont des personnes converties qu’elles soient majeures (2151) ou mineures (1095). Chez les hommes signalés radicalisés la part des convertis est de 30%. Si l’on cherchait une preuve de la réalité prosélyte de l’islamisme et de son efficacité jusqu’à l’horreur, on l’a.

 

Nous sommes ainsi fondés à considérer que les signes ou accoutrements vestimentaires qui sont l’expression de cette idéologie, notamment de soumission voire d’asservissement de la femme, n’ont pas leur place dans notre démocratie du fait de leur signification et de leur visée prosélyte.

 

Qu’on le veuille ou non, que cela plaise ou pas,  certaines tenues vestimentaires islamiques –  tel le voile intégral du corps de la femme (niquab, hidjab ou burka) – sont des signes d’une idéologie rétrograde, de son prosélytisme et de rien d’autre, quel que soit le ressenti individuel de celles qui consentent à s’en revêtir.

 

Comment rattacher en effet ces tenues à une tradition locale ou familiale, voire à l’expression d’une spiritualité, alors qu’il  ne s’agit que d’occulter la femme dans l’espace public ? C’est ce que nous avons déjà écrit dans notre article paru en ce début d’année dans Marianne sur les quatre questions que pose l’islam radical à l’Etat de droit[5].

 

Bref, à persister à le nier ou à ne pas l’exprimer notamment dans les programmes politiques, nous restons en deçà de la Cour européenne qui, elle, a courageusement décidé que l’islam radical et la charia (qui voilent le corps des femmes) ne pouvaient prétendre à la protection de la CEDH parce qu’ils se situaient ontologiquement en dehors d’elle.

 

Considérons donc qu’il en va de même pour certains des signes explicites de cette idéologie, notamment vestimentaires, et disons le déjà clairement en les identifiant comme tels, comme nous avons su le faire pour les signes, insignes et accoutrements de l’idéologie nazie[6].

 

La question de leur interdiction dans l’espace public ne vient qu’ensuite, comme une conséquence possible.  Certaines tenues vestimentaires pourraient ainsi faire l’objet d’interdiction de port dans l’espace public[7] ou, même sans interdiction, de politiques publiques visant à combattre leur développement et tendant même à leur disparition progressive.

 

Mais, sans un travail préalable de réflexion et d’identification de ce qui n’est pas acceptable, non seulement une interdiction n’a aucun sens mais aucune politique publique visant à combattre de telles pratiques par la persuasion n’est possible.

 

Bref, ce qu’il nous faut c’est une toute autre ambition que de n’aborder la question qu’au travers de la seule interdiction du voile à l’université….

 

 

En ce sens, les candidats républicains sincèrement attachés aux droits des femmes devraient s’engager à donner, par la loi, la possibilité à toutes les personnes publiques ou privées (universités,  associations, clubs sportifs, etc.) d’interdire dans leur règlement intérieur certains signes, vêtements ou comportements prosélytes, à l’instar de ce qu’a déjà fait le législateur Français en 2016 pour les entreprises.

 

Car, comme se plaisait à le dire le bon Lacordaire : « Entre le fort et le faible, entre le riche et le pauvre, entre le maître et le serviteur, c’est la liberté qui opprime, et la loi qui affranchit »…

On ajouterait volontiers à l’énumération : « Entre l’islamiste et la femme musulmane… ».

 

Aux lendemains du 8 mars, le rappeler aux candidats était le bien le minimum que l’on puisse faire.

 

 

 

Wanda Diébolt, Inspectrice générale honoraire de l’équipement

Bruno Bertrand, Magistrat

Jean Petrilli, Avocat

Francois Braize, Inspecteur général honoraire des affaires culturelles

 

 

 

 

 

[1] Bloc de constitutionnalité au sens de la jurisprudence du Conseil constitutionnel (voir notre article dans SLATE http://www.slate.fr/story/89331/fn-dissolution) et identité constitutionnelle de la France à laquelle ce même Conseil fait également référence

[2] Convention européenne des droits de l’Homme ratifiée par la France et jurisprudence de la Cour européenne sur l’islam radical et ses prétentions

[3] Nous sommes cohérents et, là dessus aussi, farouchement favorable au droit du sol…

[5] Voir http://www.marianne.net/agora-les-4-principales-questions-que-pose-islam-radical-notre-etat-droit-100249137.html

[6] Signes, insignes et accoutrements dont le port est sanctionné par le code pénal

[7] Ce qui est déjà le cas, pour la protection non pas de la femme mais de l’ordre public, des tenues qui permettent la dissimulation du visage dans l’espace public